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#Expertise – Billet 3

Titre de l’article : L’Error-Related Negativity prédit l’apprentissage par le renforcement et les biais de conflit

Auteurs : B.S. Woroch et T. Curran

Date de parution : 2005

Résumé en quelques mots

Les ErN (Error-Related Negativity) sont des marqueurs électrophysiologiques activés dans le cingulaire antérieur. Mesurés par EEG, les ErN produisent une baisse de dopamine quand nous faisons des erreurs dans une tâche cognitive (“Mince, je me suis trompé.e”). Un autre courant attribue à l’ErN un “simple” indice de gestion de conflit cognitif (“Tiens, ça ne s’est pas passé comme prévu”).

L’étude démontre que les ErN ne sont pas seulement responsables de la détection d’erreur mais également de leur correction. Plus les ErN sont larges, meilleure est la capacité d’apprentissage en évitant mieux les réponses inadaptées. Le ralentissement observé après une erreur est donc moins comportemental (ralentissement du délai de réponse) que cognitif (apprentissage pour ne pas reproduire l’erreur).

Les apprenants de l’étude sont répartis en 2 groupes : apprenants par renforcement positif (“c’était bien ça”) ou négatif (“Mince il y a une erreur”). Les apprenants négatifs avaient des ErN plus élevés montrant qu’ils étaient plus affectés par les erreurs et donc apprenaient davantage que les apprenants positifs.

Encore mieux, il démontre que les apprenants qui utilisent leurs ErN – sont plus efficaces que ceux qui apprennent plutôt de leurs réussites (ErN +). En effet, face à une tâche de choix entre 2 bonnes réponses ou 2 mauvaises, l’étude montre que nous sommes davantage enclin à apprendre de nos erreurs que de nos bons choix.

En conclusion, l’article montre que les ErN peuvent être comprises comme un indicateur de la flexibilité cognitive, nécessaire aux apprentissages.

Pourquoi c’est important

L’ErN se déclenche quand le cerveau détecte une erreur :

  • je croyais que j’avais la bonne réponse > c’est pourtant la mauvaise : ErN –
  • Je croyais que j’avais la mauvaise réponse > c’est pourtant la bonne : ErN –

L’ErN – renvoie donc à une erreur de prédiction et non à une erreur cognitive.

Nous pouvons être apprenant “ErN négative” : “j’apprends de mes erreurs” ; ou nous pouvons être apprenant “ErN positive” : “J’apprends de mes réussites”

Or l’étude a établi que les ErN étaient plus importantes face à des erreurs qu’à des réussites. Elle montre donc clairement l‘importance du traitement de l’erreur.

Or l’ErN est dépendante du feedback que l’apprenant reçoit. Je n’ai pas de feedback (pas de “c’est bien ça” ou “ce n’est pas ça”), je n’ai pas d’ErN. Logique.

Cet article est donc important pour comprendre et qualifier le type de feedback à renvoyer en fonction de l’erreur et de l’apprenant.

Ce que ça change

L’amplitude de l’ErN prédit la sensibilité à l’apprentissage par renforcement positif ou négatif, le degré avec lequel les participants apprennent de leurs erreurs.

Il est donc important de savoir comment le patient apprend : plutôt en ErN positif ou négatif, pour savoir comment l’aider dans la correction de ses erreurs et dans sa réatroaction (rétroaction : j’apprends à retenir mon 1er mouvement pour trouver une autre manière de résoudre la tâche. Typiquement c’est la rétroaction qui inhibe le critère longueur pour entrer dans le critère dénombrement).

Puisque les ErN sont aussi responsables de la gestion de conflits, il peut être important de renforcer l’ErN – de nos patients pour les aider à mieux gérer leur affectivité (ne pas avoir peur d’échouer) et ouvrir leur flexibilité cognitive. Ne pas avoir peur du conflit, ne pas avoir peur de l’échec, avoir un sentiment de stabilité et de sérénité face aux apprentissages.

Concrètement

  • Je mesure l’importance de mes retours en rééducation. Il ne s’agit pas que de penser récompense (“c’est bien, bravo” : ErN+), ni même de procéder à des auto-corrections rapides (à l’ordinateur par exemple, et hop, on passe vite à l’item d’après). Il s’agit au contraire de renvoyer le feedback nécessaire au repérage et au traitement de l’erreur.
    J’intègre les ErN négatifs comme une modalité de soutien comportemental.

  • Je prends en compte la sensibilité à la rétroaction. J’ouvre une vraie réflexion sur les erreurs avec mon ou ma patient.e. Je lui permets de connaître ses erreurs, pour savoir comment les éviter plus tard. Je lui apprends à “Rater mieux la prochaine fois” (merci Charles Pépin).
    Je travaille à la sensibilité à la correction des erreurs. J’oriente mon ou ma patient.e vers le mode “lecture”, l’auto-correction au lieu du mode “auto-jugement négatif”.
    Je traite les ErN négatifs comme une occasion d’apprendre.

  • Je quitte ma posture de gentil.le orthophoniste qui place son ou sa patient.e en zone de réussite (“pour l’encourager”) et j’intègre le traitement de l’erreur comme une composante essentielle à l’apprentissage.
    Je considère la zone proximale de développement comme une zone d’erreurs acceptables et compréhensibles et non pas comme une zone de soutien à la réussite.

Lien vers l’article complet : https://doi.org/10.1016/j.neuron.2005.06.020

👉 Pour aller plus loin sur le traitement de l’erreur et le changement de posture, rendez-vous sur lobster-orthophonie.com, onglet formation > Haut potentiel et apprentissages.

👉 Pour aller plus loin surle soutien comportemental,  rendez-vous sur lobster-orthophonie.com, onglet formation > ChronOrtho module 2 – La prise en soin intensive https://lobster-orthophonie.com/formations-en-ligne/e-learning/chronortho-2-la-prise-en-soin-intensive/

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